Causerie mensuelle du CIRA-Marseille.
Au moment où s’est posée la question du contrôle ouvrier,
révolutionnaire ou réformiste, du procès de production, les luttes
quotidiennes sur le lieu de travail, à Paris et Barcelone, étaient des
faits de résistance :
« La résistance était aussi un phénomène conjoncturel et cyclique, mais
les refus sont restés une part intrinséque de la culture ouvrière et
sont apparus à différentes périodes avec diverses divisions du travail.
Pendant les Fronts populaires, les ouvriers se révoltaient contre un
ensemble de disciplines, y compris celles imposées par les organisations
ouvrières. Les salariés souhaitaient certainement contrôler leurs lieux
de travail, mais généralement afin d’y travailler moins. On peut
supposer que la façon d’éliminer la résistance n’est pas le contrôle
ouvrier sur les moyens de production mais plutôt l’abolition du travail
salarié lui-même. »
Il nous est alors possible de voir, dans ces affrontements entre
ouvriers et organisations ouvrières, des collectivités barcelonaises aux
usines aéronautiques parisiennes, la contradiction interne des
mouvements de Front populaire, qu’ils aient été révolutionnaires ou
réformistes. L’impossibilité d’un triomphe de la classe du travail, en
tant que telle, se manifeste sous la forme la plus empirique. C’est la
faillite d’un programme ouvrier dans ses propres termes, alors sommé de
se réaliser dans un moment critique.
Michael Seidman est professeur d’histoire à l’université de Caroline du
Nord, Wilmington aux États-Unis, spécialiste de l’histoire contemporaine
française et espagnole. L’auteur a également publié Republic of Egos : A
Social History of the Spanish Civil War (2002), The Imaginary
Revolution : Parisian Students and Workers in 1968 (2004), The
Victorious Counterrevolution : the Nationalist Effort in the Spanish
Civil War (2011) et Transatlantic Antifascisms : from the Spanish Civil
War to the End of World War II.